Textes et photos © Geneviève-Fontan-2022
Sacs du soir provenant de la succession Caroline Reboux.
En fond sac à monture en écaille brune à 4 charnières. Au milieu : sac à monture en écaille blonde, fermoir en or gravé au monogramme de Lucienne Rabaté. En premier plan : sac avec monture en écaille blonde, fermoir en vermeil. Années 1927.
Evening bags from the Caroline Reboux estate. Brown tortoiseshell bag with 4 hinges at the bottom. In the middle : blond tortoiseshell bag, gold clasp engraved with the monogram of Lucienne Rabaté. In foreground : bag with blond tortoiseshell frame, vermeil clasp. Years 1927.
Caroline Reboux (1827-1937) et Lucienne Rabaté (1885-1960) , modistes 23 Rue de la Paix à Paris, ont créé le Parfum Rouge, et le Parfum Vert (carré émaillé au centre de la face principale du flacon).
Caroline Reboux and Lucienne Rabaté, milliners 23 Rue de la Paix in Paris, created the Parfum Rouge, and the Parfum Vert (an enamelled square in the center of the main face of the bottle).
Le Parfum Rouge dans son coffret
Le Parfum Rouge in its box (Coll.GF)
Caroline Reboux au Concours
d'élégance 1924
Carline Reboux
Carolline Reboux photographie argentique
Caroline a été élevée à la Cour de Belgique. Sa grand-mère, Emilie le Roy de Gausendrier, était dame d’honneur de la Reine. Sa mère épouse l’écrivain Charles Reboux, puis toute la famille quitte Bruxelles.
Caroline enfant, raffole des couleurs et adore dessiner. Jusqu’à seize ans, elle suit une formation artistique. Mais la ruine de son père l’oblige à tout arrêter pour gagner sa vie. Le travail rémunéré pour une femme est à cette époque considéré comme une sorte de déchéance.
Courageuse, la joie de vivre au cœur, Caroline loue une modeste chambre en cachette de sa mère pour essayer, tout en travaillant, de se perfectionner dans le métier de modiste. Elle imagine des formes dans des couleurs osées et fait profiter son entourage de ses créations. Un jour, lors d'une réception, une Grande Dame remarque un splendide chapeau porté par une de ses amies. Aussitôt La Grande Dame, empressée, émet le désir de rencontrer la créatrice talentueuse. Elle lui passe commande d’un chapeau exceptionnel pour un mariage où l’Empereur est attendu. Le chapeau fait sensation et Caroline est conviée à rencontrer l’Impératrice Eugénie.
Sac pochette signé Caroline Reboux
Sac pochette en satin noir, avec gland-fermoir en jade sculpté, signé Caroline Reboux, années 1925. En fond chapeau de CR cira 1950.
Satin clutch bag with a clasp with chased jade decoration, signed Caroline Reboux, years 1925. At the bottom hat of CR cira 1950.
Gland de fermeture en jade
opposite : detail of the jade fastening tassel
Caroline was raised in the Court of Belgium. Her grandmother, Emilie le Roy de Gausendrier, was lady-in-waiting to the Queen. Her mother married the writer Charles Reboux, then the whole family left Brussels.
As a child, Caroline loved colours and loved to draw. Until the age of sixteen, she follows an artistic training. But her father's ruin forces her to stop everything to earn a living. Paid work for a woman is at that time considered as a kind of forfeiture.
Courageous, with the joy of living at heart, Caroline rents a modest room in secret from her mother to try, while working, to improve her skills as a milliner. She imagines shapes in daring colours and makes her entourage benefit from her creations. One day, during a reception, a Grande Dame noticed a splendid hat worn by one of her friends. The Grande Dame, in a hurry, immediately expressed the desire to meet the talented designer. She orders her an exceptional hat for a wedding where the Emperor is expected. The hat causes a sensation and Caroline is invited to meet Empress Eugenie.
Dès lors, une ascension extraordinaire comble la modiste tout au long de sa carrière. Le monde entier fait appel à elle pour des commandes prestigieuses. Elle est adorée de ses clientes pour sa grande simplicité, son talent et sa bonté. De son mariage naissent deux enfants. Sa fille épouse l’écrivain Paul Bilhaud et son fils, Paul Reboux, fait une grande carrière dans les lettres. Elle s’intéresse et aime toutes les formes de l’art qui donnent un sens supplémentaire à sa vie.
From then on, the milliner's career was filled with an extraordinary rise. The whole world calls upon her for prestigious commissions. She is adored by her clients for her great simplicity, her talent and her kindness. She is married and has two children. Her daughter married the writer Paul Bilhaud and her son, Paul Reboux, made a great career in letters. She is interested in and loves all forms of art that give extra meaning to her life.
Son salon en rotonde de La Chaussée d’Antin devient le rendez-vous des artistes et des beaux esprits. Pour elle, Renaldo Hahn chante ses airs préférés. Cortot à son piano joue avec émoi et Granier chante à l’unisson. Fernand Gregh lit des poèmes et d’Annuzio se montre l’étincelant causeur bien connu du Tout-Paris. La veille d’un voyage il lui envoie ces mots : « J’aurais bien voulu vous revoir, Madame, avant votre départ, pour vous remercier encore une fois de votre accueil exquis… Un visage de bonté vivant et souriant, parmi tant de masques !... Que l’Italie vous enivre d’un bonheur sans pareil ! »
Elle s'installe 23 rue de la Paix à Paris et prend pour associé sa meilleure amie Luncienne Rabaté.
Pour ses créations, Caroline Reboux s’inspire bien souvent de la nature. Sur une grève dorée de la Bretagne, elle s’arrête devant des chardons maritimes aux tiges bleues, aux piquants mauves… Cette année-là les élégantes raffinées mirent des toques drapées de velours blond, ornées sur un côté de chardons fidèlement reproduits, inspirés de sa cueillette.
L’été suivant, non loin de Douarnenez, elle observe de vieilles dames qui se servent de coquillages pour fabriquer des églantines. Elle a l’idée de décorer la toque, de son amie Bartet, de ces « églantines de mer ». On dit que les deux vieilles dames firent fortune à l’issue de cette rencontre. Parmi ses idées originales, Caroline Reboux invente les voilettes de couleurs, une idée rafraichissante pour ses austères voiles de cérémonies.
Les toques qui portent son nom sont façonnées selon ses directives, pour mettre en valeur chaque visage, afin d’harmoniser la coiffe aux courbes des profils.
Gauche et hostile au marchandage, timide et gênée par le commerce et l’argent, elle paye tout plus cher que les autres. Elle n’a pas l’habitude d’insister pour réclamer les factures en instance qui passent rapidement en archive. Elle offre des coiffes aux jolis visages qui ne peuvent s’offrir ce luxe, pour le seul plaisir de la mise en beauté.
Elle fait toutefois fortune et investit tout son argent pour secourir la misère. Elle se cache pour faire le bien. Ses employées l’adorent. Elle créé des cantines maternelles, en grande partie à ses frais, aidée par des amies, œuvres reconnues plus tard par l’État d’utilité publique. On veut la décorer. Elle refuse.
Its lounge in the rotunda of La Chaussée d'Antin became the meeting place for artists and beautiful spirits. For her, Renaldo Hahn sings his favourite tunes. Cortot at his piano plays with emotion and Granier sings in unison. Fernand Gregh reads poems and d'Annuzio shows himself to be the glittering talker well known to the Parisian people. On the eve of a trip he sends him these words: "I would have liked to see you again, Madame, before your departure, to thank you once again for your exquisite welcome... A face of kindness alive and smiling, among so many masks! May Italy intoxicate you with an unparalleled happiness ! »
She moved to 23 rue de la Paix in Paris and took her best friend Luncienne Rabaté as her partner.
For her creations, Caroline Reboux is often inspired by nature. On a golden shore of Brittany, she stopped in front of sea thistles with blue stems and purple prickles... That year, the elegant refined ladies put on toques draped in blond velvet, decorated on one side with faithfully reproduced thistles, inspired by her harvest.
The following summer, not far from Douarnenez, she observed old ladies using shells to make rosehips. She had the idea of decorating her friend Bartet's toque with these "wild rose hips". It is said that the two old ladies made a fortune as a result of this encounter. Among her original ideas, Caroline Reboux invented coloured veils, a refreshing idea for her austere ceremonial sails.
The toques that bear her name are fashioned according to her instructions, to highlight each face, in order to harmonize the headdress with the curves of the profiles.
Left and hostile to haggling, shy and embarrassed by trade and money, she pays more for everything than others. She is not accustomed to insisting on claiming outstanding bills that quickly pass into the archives. She offers headdresses with pretty faces that cannot afford this luxury, for the sole pleasure of beauty.
However, she makes a fortune and invests all her money to relieve misery. She hides to do good. Her employees love her. She created maternal canteens, largely at her own expense, with the help of friends, works that were later recognized by the State as being of public utility. We want to decorate her. She refuses.
Sac du soir en crocodile signé Hermès Paris 24 Fg St Honoré - Acquisition à l'occasion de la vente de la succession Caroline Reboux le 19 mai 2019 - Etude Anton Montreuil sur Mer
Crocodile evening bag signed Hermès Paris 24 Fg St Honoré - Acquisition on the occasion of the sale of the Caroline Reboux estate on 19 May 2019 - Etude Anton Montreuil sur Mer
L’Amérique lui offre plusieurs « millions-or » de sa maison, lorsqu’elle désire se retirer, mais elle préfère céder le « 23 rue de la Paix » aux trois « Premières » qui ont travaillé à ses côtés, moyennant une modique rente annuelle.
Charme, élégance, goût parisien, intelligence et générosité caractérisent cet étonnant personnage.
America offers her several "gold million" from her house when she wants to retire, but she prefers to give up "23 rue de la Paix" to the three "Firsts" who worked alongside her, for a modest annual pension.
Charm, elegance, Parisian taste, intelligence and generosity characterize this surprising character.
Geneviève Fontan - Paru dans Parfum Art et Valeur n°45 ,mars 1998
Source: Fémina 1927
Lucienne Rabaté
l
Lucienne Rabaté, photographie argentique
Lucienne Rabaté (1885-1960) créatrice de mode a dirigé la maison Caroline Reboux de 1920 à 1956.
C'est auprès de Lucienne Rabaté que Gabrielle Chanel a appris les bases du métier de modiste.
Dans sa boutique parisienne au 9 avenue Matignon, elle reçoit une clientèle de renom composée d' artistes, notamment Marlène Dietrich, Elsa Triolet, Arletty, Madeleine Renaud et de mondaines, notamment Madame Pereire, la duchesse de Windsor, la Baronne de Rothschild) qui l'appelaient « Mademoiselle Lucienne ». Sa créativité et son talent s'exprimait au mieux lorsqu'elle élaborait un modèle de couvre-chef directement sur la tête de la cliente, exactement comme faisait Paul Poiret.
En 1956, à la fermeture de la maison Reboux, le magazine L'Officiel de la Mode a consacré un article à Caroline Reboux faisant référence à Lucienne Rabaté.
Lucienne Rabaté (1885-1960) fashion designer directed the house Caroline Reboux from 1920 to 1956.
It was from Lucienne Rabaté that Gabrielle Chanel learned the basics of the milliner's trade.
In her Parisian boutique at 9 avenue Matignon, she received a renowned clientele composed of artists, including Marlène Dietrich, Elsa Triolet, Arletty, Madeleine Renaud and socialites, including Madame Pereire, the Duchess of Windsor, the Baroness de Rothschild) who called her "Mademoiselle Lucienne". Her creativity and talent was at its best when she designed a headgear model directly on the client's head, just as Paul Poiret did.
In 1956, at the closing of the Reboux house, the magazine L'Officiel de la Mode devoted an article to Caroline Reboux referring to Lucienne Rabaté.
Her creations can be found in all the major fashion museums.
FIN
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